Sans Détour

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Kafando et les vœux à la nation

Une tentative de reprise en main au moment où Zida est dans le creux de la vague !

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Son message de nouvel an, nous a changé avec les litanies monocordes de Blaise Compaoré. Le président Kafando a su donner de l’intérêt à son message en jouant sur deux registres. D’abord celui de "personnalité dernier recours" et puis celui d'un général en chef avec la fermeté affirmée aussi bien contre les anciens caciques qui auraient intérêts à se tenir à carreau que les activistes contestataires compulsifs. 

Kafando n’avait pas pris la parole publiquement depuis les commémorations du 11 décembre à Dédougou. Il s’était gardé de s’exprimer sur les questions chaudes de la gouvernance Zida, laissant ce dernier se débattre comme il pouvait, avec les turpitudes de ses décisions inconséquentes.

La Saint Sylvestre a été l’occasion pour Kafando de parler. Il a montré qu’il n’était pas d’accord dans la forme avec certaines décisions. Notamment la suspension des partis politiques de l’ex majorité. Il a levé la suspension qui les frappait, mais confirme les motifs pour lesquels ils ont été sanctionnés « un activisme débordant qui pourrait menacer la sécurité de l’Etat ». En un mot, les partis en question se livrent à des actions de subversion, contre les nouvelles autorités.

Il donne des indications pour les consultations électorales à venir. Le premier round devrait se tenir en début octobre, probablement le deuxième dimanche d’octobre et devrait concerner la présidentielle, qui selon toute vraisemblance ne sera pas couplée. Un parti comme le MPP n’y est pas favorable, au regard des risques qui ont été constatés dans d’autres pays. Au Niger par exemple, le scrutin de sortie de crise a été couplé, « présidentiel et législatif ». Il s’en est suivi que le vainqueur de la présidentielle n’a pas pu capitaliser « le gain de la victoire » avec une majorité confortable au parlement. Le parti du président Issoufou qui est arrivé en  tête en nombre de députés, a manqué la majorité de peu et a été contraint à la cohabitation avec Hama Amadou. Cela, on le voit ne se termine pas toujours bien. Dans un système de quinquennat où les durées des mandats exécutif et législatif coïncident, pour les besoins d’une stabilité du système, il est préférable que le vainqueur de la présidentielle confirme sa légitimité par un confortable succès au parlement. En ce moment le président a les moyens de déployer son programme pour lequel il a été élu. Les discussions annoncées par Kafando vont se focaliser sur cette question et vont mettre aux prises les partis forts qui ont intérêt à une présidentielle seule et les partis faibles qui ont intérêt au couplage.  

Kafondo, n’est pas revenu sur le fonds des contestations. Il a même fait une sortie malheureuse en fustigeant les activistes qui contestent intempestivement, alors qu’ils mangeaient au râtelier « du régime déchu». Pour quelqu’un qui a servi,  toute sa carrière durant jusqu’à sa retraite, le même régime déchu, cette allusion a manqué de pudeur.

On s’attendait, comme il l’a fait pour la levée de suspension contre le CDP et l’ADF/RDA qu’il réaffirme les bases éthiques de la transition qui imposent à toute personne appelée à servir au niveau du gouvernement et au niveau des hautes instances de l’Etat qu’il soit irréprochable moralement. En cela il aurait pris de la hauteur et se serait mis au dessus des amitiés hasardeuses de Zida qui sont la cause de ces « erreurs de casting ».

Kafando n’a donc rien dit de l’affaire Diéguemdé ou Guiguemdé (on ne sait toujours pas quel est le vrai patronyme de ce ministre). En cela il ne renforce pas l’autorité de l’Etat. Il prend même le risque d’un clash avec le balai citoyen, qui avait jusque là fait preuve « de bienveillance » envers le gouvernement de transition.

Il prend aussi le risque inutile de durcir la défiance du RSP. On sait que depuis le 30 décembre, le régiment de sécurité présidentiel est en fronde ouverte contre Zida qu’il menace de destitution. Le RSP exigeait trois choses au moins :

-          Le paiement de la prime de 20 000 f cfa par soldat pour la fin d’année instituée par Blaise Compaoré

-          La nomination de Céleste Coulibaly, comme chef d’Etat major particulier de la présidence, en lieu et place du commandant Nikiéma

-          Le départ du gouvernement de Zida et de son ministre de la Sécurité Auguste Denise Barry. Aux dernières nouvelles, les pourparlers qui ont eu lieu sous la médiation du général Gilbert Diéndéré ont permis de sauver la tête de Zida et de Auguste Denise Barry, mais les éléments du RSP tiennent au remplacement de Nikiema par Céleste Coulibaly.

Au niveau des partis politiques aussi, la confiance s’érode avec Zida. De plus en plus au niveau des grands partis ont craint un scénario à la « Guei » avec Zida. Pas qu’il va se présenter à la présidentielle d’octobre 2015, mais des risques de marchandages et de soutiens tacites en fonction des candidatures qui pourraient faciliter ses ambitions pour l’après 2015. Si Zida conduit cette transition sans trop d’accrocs, il ne se contentera pas de son statut « d’ancien chef d’Etat ». Il posera les jalons d’un scénario à la « ATT » après les deux mandats de celui qu’il aura contribué à faire élire en octobre 2015.  

Enfin quid des victimes des 30 et 31 octobre ? Faut-il attendre des états généraux de la justice la solution miracle ? Le président ne s’y est pas attardé outre mesure. Il n’a rien dit non plus de l’hommage national qui devait leur être rendu. C’est un sujet qui sera reversé certainement à la commission Réconciliation dont le texte de loi est fin prêt et attend d’être adopté par le CNT.

Il y a donc du boulot. Kafando peut se plaindre ou même s’irriter de la critique « facile », mais il oublie que ce sont ses promesses n’ont suivis d’effets ou parfois même, ses promesses insuffisamment mûries qui en sont à la base. Cette affaire Sankara le montre bien. Finalement ce sera à la famille Sankara de manifester une volonté d’exhumation pour avoir le soutien du gouvernement. Qu’avait-il au juste promis le 27 novembre, dans son discours de prise de charge ? A quoi renvoyait le « fait du prince » dans cette affaire ?  

La parole présidentielle doit certainement être encore plus mûrie. Et c’est maintenant pour reconquérir les prérogatives présidentielles que l’affaiblissement de  Zida permet.  

Bonne année 2015 à vous qui me suivez sur ce blog.

NAB 



02/01/2015
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