Sans Détour

Sans Détour

Chronique du 20 octobre


Sous quel régime sommes-nous ?

 

On peut bien se poser la question depuis le coup d’Etat manqué du 17 septembre dernier ? Le gouvernement n’a pas décrété l’Etat d’urgence, mais c’est tout comme. Les mesures se prennent sans que personne ne s’interroge si elles sont du domaine de la loi ou du règlement. Le contexte explique tout et une bonne partie de l’opinion est d’accord et en demande même encore plus. Encore plus de la fermeté et encore plus de répression. Personne n’osera se plaindre sous peine d’être accusé du délit le plus infâmant du moment « de complicité avec les putschistes ».

 

Alors chacun se cherche et se fait discret. Il n’y a que la voix de ceux qui ont droit au chapitre qui est entendue ou peut être entendue. Or nous sommes dans une démocratie. Notre constitution est bien en place. Sauf que c’est une démocratie sans opposition. Ou disons une démocratie où la discorde n’est pas permise. Elle est même criminalisée au nom d’un consensus national « transitionnel », où il faut critiquer « constructivement ». En d’autre temps, et cela doit rappeler des souvenirs, on parlait « de critique pour le développement ».

 

Il s’ensuit que les pouvoirs de la République « certains dirons le Faso » se résument à l’exécutif. Il n’y a pas d’opposition et il n’y a pas de contre-pouvoir. Personne s’ose interroger les actes de l’exécutif. Pourtant depuis le putsch du RSP il y a eu des mesures. Evidemment selon le slogan des insurgés « le nombre faisant la force », il fait aussi la loi. Sauf que la force n’est pas la loi. C’est pourquoi on peut se demander deux choses
- Primo jusqu’où ira la répression du « délit de collaboration » avec les putschistes ? Même le président Kafando s’y est mis en se séparant de son directeur du protocole et de sa directrice de Communication. Quand le président lui-même montre la voie, les autres ont-ils encore le choix ? Pour l’instant c’est circonscrit aux agents nommés. Donc à ceux qui doivent leur poste à la transition. Mais qui peut assurer que ça va s’arrêter en si bon chemin ? N’allons-nous pas revenir insidieusement à la période de la démarcation physique ? Quand la divergence d’opinion instituait l’impossibilité de se fréquenter. Avec l’esprit qui prévaut actuellement il faut craindre pour l’après élection. Les vainqueurs se priveront-ils de la tentation de punir tous ceux qui étaient ostensiblement de l’autre camp ? Il ne s’agit pas de voir le mal partout. Mais de s’inquiéter des actions publiques qui ne sont pas encadrées par la loi. Quand l’opportunité guide l’action publique, dans un contexte où il n’y a pas de contre-pouvoir, il ne s’ensuit que des abus.
- Secundo, la mesure de sécurité qui interdit un certain type de véhicules dans la circulation. Si l’absence d’immatriculation est un délit déjà codifié, qu’il faut juste rigoureusement appliquer, la question de la nature des vitres renvoie aux types de véhicules autorisés dans le pays. Son interdiction peut-elle dès lors résulter d’un simple communiqué ? 

 

Si une nouvelle disposition règlementaire devrait changer la nature des véhicules autorisés à la circulation, nonobstant les raisons sécuritaires bien compréhensibles, les propriétaires devraient disposer d’un délai de conformation à défaut d’une exception absolutoire.
Dans nos pays où la loi a peu de cité, contrairement à ce que chacun clame, il faut faire attention à ne pas abdiquer de nos droits. L’efficacité de l’action publique se mesure, non pas à sa propension à piétiner la loi, même pour une bonne cause supposée, mais par le soin qu’elle met à tenir compte de la loi et à agir dans les limites qu’elle permet.

 

C’est pourquoi la constitution prévoit que dans des situations d’exception, l’accroissement des pouvoirs de l’exécutif s’accompagne d’un contrôle renforcé des autres pouvoirs de la République. Et puis surtout qu’il faut que la durée des mesures d’exception soit connue. Quitte à les renouveler à chaque fois que de besoin. La situation actuelle et les mesures qui sont prises doivent être mieux encadrées. Et c’est là où on attend les OSC. Sauf que les nôtres, celles qui ont pignon sur rue, sont parties prenantes de l’action du gouvernement. Pour l’Etat de droit, il n’y a rien de plus mauvais. 



20/10/2015
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