Sans Détour

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Chronique du 13 mai

CSC, peut-être vers un rétropédalage

Le CSC pourrait engager des concertations pour trouver un consensus autour de sa mesure controversée. N’est-ce pas par là qu’il aurait dû commencer.

On ne cessera pas de parler de cette sanction du conseil supérieur de la communication, tellement elle parait hors contexte, hors saison. Surtout qu’en prenant une telle sanction Nathalie et ses conseillers ont frappé les principaux acteurs de l’insurrection ; Les médias et le peuple des insurgés.

Les médias d’abord, parce que depuis 1998 et le sacrifice suprême de Norbert Zongo, une étape cruciale a été franchie dans la démystification du système Compaoré. Nathalie et ses conseillers l’ont oublié, mais en son temps la terrible fatwa des hommes du Conseil : « Si tu fais, on te fait et il n’y a rien » dissuadait toute velléité de contestation. Ce travail qui a fait tomber le Totem de Blaise Compaoré, c’est à la presse qu’on le doit. Et celui qui est allé jusqu’au sacrifice suprême pour que les burkinabè gagnent le droit d’affronter les commandos du Conseil et ne plus avoir peur de Blaise ; c’est Norbert Zongo. Un journaliste. Le premier avec la Ligue de défense de la liberté de presse de Kam Sibiri Eric a s’être dressé contre la première mesure de l’ancêtre du CSC qui avait interdit ce type d’émission sur les radios, en 1996.  

C’est avec ce combat, jusqu’au sacrifice suprême que tout est devenu possible. Une certaine citoyenneté est née. Une opinion nationale s’est constituée. Blaise lui-même l’avait tellement compris, qu’il avait collé la paix à la presse.

Les héritiers de Norbert ont continué et ont creusé encore plus loin le sillon des libertés. Une presse hardie, d’abord presse écrite, a pris le relais,  et ces dernières années, les radios sont venues renforcer ce travail formidable et exaltant de formation d’une conscience citoyenne.

Peut-on oublier si rapidement que quand l’opposition politique était squelettique et indigente, dans ce pays, c’est la presse qui a assuré ce travail de contre pouvoir au point de paraitre pour certaine d’entre elle, comme la vraie opposition, avec tous les risques qu’on peut imaginer.

La presse, dans ce pays a joué un rôle inestimable dans l’évolution et la libération des mentalités. Elle ne pas être récompensée de cette façon. Ce serait la forfaiture la plus ignoble que l’on puisse imaginer à l’encontre de Norbert Zongo et de tous ces hommes et ces femmes qui se sont sacrifiés pour la patrie. Est-ce un hasard, si deux journalistes se sont retrouvés, parmi les quatre nominés pour diriger la transition ? Parfois c’est bon de le rappeler.  

Ensuite cette mesure du CSC musèle, ces milliers de jeunes qui ont bravé la police et le terrible RSP de Blaise Compaoré depuis le 21 octobre, quand la funeste décision a été prise en Conseil des ministres de modifier l’article 37. Ce sont ces jeunes qui sont montés sur les barricades. Beaucoup étaient convaincus, que le 30 octobre, en quittant leur maison, ils n’en retourneraient pas vivants. Ils n’ont pas renoncés pour autant. Quel conseiller du CSC peut en dire autant ? Malheureusement une trentaine de ces jeunes n’en reviendra pas vivant.

Le Burkina s’apprête, dans quelques jours à leur rendre hommage. Pour eux, cette mesure du CSC est une seconde mise à mort.

Quand on a gagné une liberté au prix du sang, ceux qui ont la charge de la réguler doivent en être dignes. Réguler ne peut nullement signifier privation ou détournement. Le Conseil supérieur de la communication vient de commettre « l’heureuse faute », qui doit le ramener dans le giron de l’insurrection. Il était la dernière institution républicaine encore dans les prairies de la IVe  république. Il doit en sortir, parce qu’il gère l’énergie de la transition ; la liberté de la parole. Un peuple libre, ne peut pas être muet. Ce serait une grande douleur.      



13/05/2015
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